AGIRC-ARRCO : pas de revalorisation cette année

Les pensions AGIRC-ARRCO ne seront pas revalorisées cette année. La crise économique explique en partie que les caisses soient vides ; mais la situation financière du régime de retraite complémentaire des salariés du privé est mauvaise depuis plusieurs années.

Rappelons qu’un accord signé en 2015 par les organisations syndicales et patronales gestionnaires des régimes de retraite complémentaire du privé Agirc-Arrco avait prévu que, « face aux difficultés financières rencontrées » par ces régimes, les pensions seraient réévaluées un point au-dessous de l’inflation officielle pendant trois ans à compter de 2016. Au passage, la date de revalorisation a déjà été repoussée depuis 2016 du 1er avril au 1er novembre : un écart de sept mois pendant lesquels les effets de l’inflation officielle ne seraient pas compensés.

Dans les faits, cela n’a pas changé grand-chose. Un petit rappel historique s’impose.

  • En 2014 et 2015, les pensions n’ont pas été revalorisées. En 2015 aussi, un accord fut signé entre les organisations professionnelles, syndicales et patronales, gestionnaires de l’AGIRC-ARRCO, accord aux termes duquel les pensions seraient revalorisées un point sous l’inflation.
  • En 2016 et 2017, le taux d’inflation a été inférieur ou égal à 1 % : conformément à ce qu’avait prévu l’accord de 2015, les pensions n’ont donc pas été réévaluées.
  • En 2018, après quatre années sans évolution, les pensions ont été augmentées de 0,6 % (pour un taux d’inflation officielle finalement fixé à 1,8 %).
  • En 2019, un nouvel accord, signé le 10 mai, a prévu de revaloriser les pensions, jusqu’en 2022, en suivant la courbe de l’inflation, « pour autant que l’évolution des prix ne soit pas supérieure à celle des salaires ». Cette année-là, l’inflation officielle a atteint 1,1 % et les pensions ont été revalorisées de 1 %.
  • En 2020, les pensions auraient également dû être augmentées en fonction de l’inflation. Toutefois, l’AGIRC-ARRCO a décidé qu’elles seraient gelées jusqu’à l’année prochaine, en raison de la crise économique provoquée par l’épidémie de coronavirus.

On voit qu’au cours des dernières années, le montant des pensions a été très peu réévalué. L’inflation étant supérieure aux revalorisations en 2016, 2017 et 2018, le pouvoir d’achat des retraités s’est érodé – d’autant plus que parallèlement, beaucoup d’entre eux ont été frappés par la hausse de la CSG.

Sans négliger son impact, la crise liée au coronavirus n’explique donc pas tout, bien que la mise au chômage partiel d’un grand nombre de salariés du privé (selon le gouvernement, ils étaient encore 1,3 million au mois d’août, après un pic de 8,6 millions en avril) ait aggravé la situation financière des régimes complémentaires du privé. En effet, ce sont autant de cotisations qui ne rentrent plus dans les caisses de l’AGIRC-ARRCO. Et le taux de chômage pourrait approcher 10 % à la fin de l’année. Dans un système par répartition, c’est catastrophique !

Le déficit prévu en 2020 pourrait s’élever à 6,3 MM d'€. Pour payer les pensions, l’AGIRC-ARRCO a dû puiser dans ses réserves, ce qui l’empêchera de tenir son objectif de disposer de 6 mois de réserves à l’horizon 2033. Et si la crise sanitaire se poursuit, ses effets sur l’économie – et par ricochet sur les finances des caisses de retraite complémentaire du privé – s’amplifieront.

C’est l’occasion de souligner encore une fois la supériorité des systèmes mixtes conjuguant répartition (pour les régimes de base) et capitalisation (pour les régimes complémentaires), par rapport au « tout-répartition » privilégié par les pouvoirs publics. Certes, la crise économique fragiliserait aussi des régimes gérés en capitalisation, mais les effets en seraient moins immédiats grâce aux réserves.

Par ailleurs, il est prévu que les retraites de base seront revalorisées en janvier 2021 en fonction du taux d’inflation officiel, qui sera communiqué à la fin de l’année 2020. Rappelons que dans le secteur public, il n’existe pas de distinction entre les retraites de base et complémentaire (la Préfon, facultative, et le RAFP sont des surcomplémentaires). C’est donc l’ensemble de la pension qui sera ainsi revalorisée. Cette différence (qui portera, certes, sur un montant minime car le taux d’inflation officiel devrait être faible), introduit néanmoins une nouvelle distorsion entre les retraites du privé et les régimes spéciaux du public.


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