Retraite à 64 ans : l'aveu d'échec du gouvernement

Après avoir enterré sa réformé systémique, l'exécutif pourrait repousser l'âge de la retraite de 62 à 64 ans. Un aveu d'échec pour un gouvernement qui a refusé de s'attaquer sérieusement aux régimes spéciaux.

S’exprimant sur le délicat dossier des retraites, Bruno Lemaire a déclaré mardi 29 juin sur Cnews : « On n'a jamais intérêt en politique à remettre à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui… » Le propos ne manque pas d’aplomb puisque le gouvernement a finalement enterré l’une des réformes emblématiques du quinquennat : l’instauration d’un régime universel de retraite par points. Le ministre de l’Economie entendait ainsi justifier à demi-mot l’hypothèse, sérieusement étudiée par l’exécutif, de reculer l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Plus précisément, il s’agirait d’une bascule progressive de 62 ans et demi en 2022 (pour la génération née en 1961) à 64 ans en 2028 (pour les générations nées après 1964). Selon les services de l’Elysée, Emmanuel Macron devrait trancher la question avant le 14 juillet. Début juin, lors de son déplacement dans le Lot, le Président de la République avait préparé les esprits en posant la question : « Est-ce que nous pouvons ne rien faire sur les retraites dans les mois qui viennent ? » Voici un aveu assez lourd de sens…

Pourtant, en 2019, Monsieur Macron avait précisé, à propos d’un éventuel recul de l’âge de départ : « Je me suis engagé à ne pas le faire ». In fine, si le Président était conduit à confirmer l’option des 64 ans, envisagée par Bruno Lemaire par voie d’amendement dans le budget 2022 de la Sécurité sociale, il mangerait son chapeau en appliquant une bien curieuse logique : « Puisque que je ne peux pas ne rien faire, je fais ce que je me suis engagé à ne pas faire après avoir renoncé à faire ce que je m’étais engagé à faire… »

La faute originelle : les régimes spéciaux préservés

Une fois encore, la montagne s’apprête à accoucher d’une souris… Non pas que le report de deux ans de l’âge de départ soit une petite chose, mais l’histoire se répète : à défaut d’une réforme systémique, la France devra se contenter d’une réforme paramétrique… Pour expliquer ce fiasco, la crise sanitaire et le contexte politique ont bon dos. La réforme de Monsieur Macron échoue avant tout parce qu’elle contenait une faute originelle : conjuguer un régime universel avec le maintien, sous une forme ou une autre, des grands avantages des régimes spéciaux. Or, comme le démontre Pierre-Edouard du Cray dans son livre Retraites, l’impossible réforme (L’Artisan éditions, mars 2021), « le préalable à toute véritable réforme structurelle du système de retraite est bel et bien la suppression des régimes spéciaux ».

Une fois encore, les affiliés vont payer les pots cassés du manque de courage politique. En 2010 déjà, Monsieur Fillon avait repoussé l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans, mesure qui n’a pas suffi à régler durablement le problème des retraites.


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