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Devant la menace de grèves brandie par les syndicats, le gouvernement a trouvé la parade : arroser tous azimuts.

Ainsi, selon le Parisien, le gouvernement s’apprête à octroyer une « prime d’assiduité » aux cheminots pour éviter que ceux-ci ne se mettent en grève pendant les jeux olympiques de 2024, en guise de représailles contre la promulgation de la réforme des retraites. Non, vous ne rêvez pas ! On leur donne une gratification pour bien vouloir accepter d’effectuer le travail pour lequel ils perçoivent déjà un salaire… Il devrait en aller de même à la RATP.

Très récemment, le gouvernement a usé de méthodes similaires pour diminuer les oppositions syndicales à sa réforme des retraites. Les contrôleurs aériens, pilotes d’avions et personnels de cabine (stewards et hôtesses de l’air) ne voulaient pas du recul de l’âge légal de départ ? Qu’à cela ne tienne, l’État a engagé avec les principaux syndicats du secteur (SNCTA pour les aiguilleurs du Ciel, SNPL pour les pilotes) des négociations confidentielles, et garanti en catimini leurs avantages statutaires moyennant quoi, lesdits syndicats n’ont pas appelé pas à la grève. Gagnant-gagnant. Le seul perdant sera le contribuable, qui continuera à financer de ses deniers les avantages ainsi préservés.

Ainsi apprenait-on, dans le Figaro du 20 avril, qu’un accord avait été trouvé pour adapter la retraite complémentaire des pilotes, hôtesses et stewards, au recul de l’âge de départ. La manip est simple : le code des transports fixe l’âge de départ à la retraite des pilotes de ligne à 60 ans, et celui des personnels navigants commerciaux, à 55 ans. Au terme des accords récemment passés entre les syndicats et l’État, cette disposition du code des transports restera inchangée. Mais comment, alors, concilier ce départ à 55 ou 60 ans avec le report de l’âge légal à 64 ans ? C’est confusant, aurait dit Jacques Villeret… Mais il apparaît qu’à côté du régime de base de ces salariés (la Cnav), il existe une caisse complémentaire des personnels navigants (CRPN), spécifique à la profession qui fait le pont entre les 55 ou 60 ans et l’âge légal de départ. Autrement dit, ces personnels de l’aviation civile continueront à partir bien avant 64 ans, mais la caisse paiera en théorie le « surcoût », c’est-à-dire les pensions. En théorie seulement, parce qu’en réalité c’est l’État, donc le contribuable, qui mettra la main à la poche : tel est l’objet des négociations qui ont eu lieu entre le gouvernement et la CPRN et des accords sur lesquelles elles ont débouché.

Il en avait été de même, auparavant, pour le très prodigue régime spécial des contrôleurs aériens. Dans ce cas aussi, le gouvernement a entrepris de « compenser » le coût du recul de l’âge légal de départ (de 52 à 54 ans), aux frais des contribuables.

En contrepartie de cette participation de l’État au maintien de leurs statuts respectifs, les syndicats majoritaires (SNPL pour les pilotes, SNCTA pour les contrôleurs aériens) sont restés en marge du mouvement de grève déclenché par les principales centrales syndicales.

Il est éminemment probable que ce canevas servira pour d’autres régimes spéciaux : pourquoi se gêner, puisque ça "marche" ? Gouverner ne signifie plus qu’une chose : acheter la paix sociale, céder au moindre chantage à la grève… Rien de plus, rien de moins.


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