Transports publics : la grève de trop

Dans le Figaro*, Sauvegarde Retraites souligne les revendications abusives des cheminots. Ils ont obtenu des compensations énormes et leur régime de retraite reste "spécial".

Les syndicats de la SNCF, ainsi qu’une partie de ceux de la RATP, ont appelé à une nouvelle grève le 22 mai. Dans leur préavis, ils revendiquent « l’arrêt de l’allongement de la durée de cotisation pour percevoir une retraite pleine et entière » et « la réouverture des négociations salariales ». Insatiables, ils exigent, au surplus, « la poursuite des négociations, dans le cadre de la réforme du régime spécial de retraite des cheminots » discutée à l’automne dernier et mise en place depuis le mois de janvier.
Or, toutes ces revendications sont abusives.
Le gouvernement n’a pas cessé de « négocier » à l’automne dernier et les résultats ont été plutôt positifs pour ceux qui travaillent aux chemins de fer. Plus encore, en octobre 2007, avant la grève, la présidente de la SNCF, Anne-Marie Idrac, avait envoyé une lettre à chacun des 168 000 cheminots. Cette lettre contenait non seulement une ouverture au dialogue pour prévenir la grève mais aussi une série de 14 propositions avec de nouveaux avantages en échange d’une acceptation de la réforme. Ensuite, contrairement à ce que soutiennent les syndicats, la réforme, loin de leur porter préjudice, entérine le caractère « spécial » de leur régime de retraite.
C’est d’ailleurs ce qui était convenu avec le ministère des Affaires sociales avant même le début des négociations : « Le gouvernement n’entend pas remettre en cause l’existence des régimes spéciaux de retraite mais, au contraire, garantir leur viabilité financière et donc leur pérennité ». Ainsi, malgré un allongement de la durée d’activité, les compensations obtenues sont extrêmement avantageuses pour les agents. En commençant par les plus anciens qui ne sont pas concernés par la réforme. Car la fameuse « décote » (5 % de pension en moins par annuité manquante) n’entrera en vigueur qu’en 2010 et s’appliquera de manière très progressive d’ici 2020, tout en étant, au bout du compte, plafonnée à 2,5 annuités manquantes. Pour ceux qui sont encore pour des années dans l’entreprise, la situation reste toujours très enviable. Les conducteurs de train qui partaient à la retraite à 50 ans ont obtenu des aménagements qui leur donnent la possibilité d’arrêter de travailler à 52 ans au plus tard. Comme ils auront toujours une année de cotisation cadeau pour cinq travaillées, les « sacrifices » consentis seront insignifiants.
Par ailleurs, dans les nouveaux dispositifs « négociés » avec le ministre Xavier Bertrand, la prise en compte des primes dans le calcul des retraites, les possibilités très avantageuses de rachat des trimestres avec des participations importantes de l’entreprise rendent la réforme très agréable pour les agents. Pour ce qui est de la baisse de la retraite invoquée par les syndicats, toujours dans le cadre des « négociations », la SNCF a accordé à ses agents un système de compte épargne-temps tandis que les promotions en grade avant la fin d’activité ont été largement facilitées. Au final, les anciens employés de la SNCF partiront à la retraite dans les mêmes conditions qu’auparavant, avec une pension calculée en fonction des six derniers mois de salaire contre les 25 meilleures années dans le privé.
Les retraités de la SNCF touchent en moyenne 1 620 euros/mois contre 1 465 euros/mois pour quelqu’un qui a fait une carrière complète dans le privé et cet écart ne devrait donc cesser de se creuser.

Enfin, faut-il rappeler aux syndicats que le taux de cotisation salariale, à la SNCF, est figé depuis près de vingt ans à 7,85 %, et que l’augmentation des dépenses retraite est exclusivement prise en charge par les usagers et les contribuables ?
Ainsi, chaque année, une hausse de la cotisation employeur, pour financer les nouveaux avantages maison, est programmée : 11,96 % en 2007, 12,27 % en 2008, 12,62 % en 2009 et il est même prévu que cette cotisation soit portée à 12,73 % en 2010 !

Mieux, le régime de retraite des cheminots est financé, aujourd’hui, grâce à une subvention de 3 milliards d’euros,
ce qui représente la moitié du budget du ministère de la Justice ou, encore, le coût de huit hôpitaux Pompidou. Et cette dotation ne devrait, elle aussi, cesser d’augmenter.
En définitive, dans le cadre de la réforme des retraites, l’ultime proposition des syndicats de la SNCF se limite à cette seule revendication : des milliards ! Des milliards ! Des milliards !
Pierre-Edouard Du Cray, Directeur des études à Sauvegarde Retraites
Nicolas Lecaussin, Directeur des recherches à Sauvegarde Retraites, et auteur de "Cet Etat qui tue la France " (Plon, 2005) et de "L’Absolutisme efficace" (Plon, 2008).
*Tribune publiée dans l'édition du 22 mai 2008 du Figaro.

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