Pseudo-cotisations du public : les craques du COR

Dans son dernier rapport, le Conseil d’orientation des retraites considère les pseudo-cotisations du public comme réelles, ce qui laisse planer un fort doute sur la sincérité de son rapport annuel, publié en juin.

Le rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR), publié au mois de juin, contient un demi-aveu concernant les régimes spéciaux de retraite du secteur public. Le passage mérite d’être cité in extenso :

« En projection, les ressources du système de retraite, et a fortiori le solde, sont très largement conventionnels. En effet, dans certains régimes spéciaux (SNCF, RATP, régimes des mines, marins ou encore régime des ouvriers de l’État), les ressources sont déterminées par les dépenses année après année et l’équilibre financier est assuré par une subvention publique. Il en est de même dans le régime de la fonction publique de l’État, où l’équilibre financier est assuré en dernier ressort par une contribution de l’État en tant qu’employeur. Les projections ont ainsi peu de sens pour ces régimes puisqu’en appliquant cette règle, ils sont par construction en permanence à l’équilibre. »

C’est ainsi que l’on procède dans le secteur public : on effectue d’abord les dépenses avant de se soucier du moyen de les financer, puisque l’État y remédiera, quoiqu’il en soit.

Mais l’aveu du COR n’est pas complet. Même si les rédacteurs du rapport admettent qu’en dernier ressort c’est une contribution publique – autrement dit, les contribuables – qui assure « l’équilibre financier » des régimes spéciaux, y compris celui de la fonction publique, le COR feint de croire à la réalité des cotisations que l’État est supposé verser, en tant qu’employeur, pour ses propres agents.

Ainsi écrit-il que « les taux de cotisation des employeurs (sic) de fonctionnaires de l’État (…) ont été, selon la réglementation en vigueur, ajustés au fil du temps de manière à assurer l’équilibre financier de la fonction publique de l’État ils sont ainsi passés, entre 2006 et 2014, de 49,9 % à 74,28 % pour les fonctionnaires civils, et de 100 % à 126,1 % pour les militaires (régime de l’État) ».

En réalité, ils pourraient aussi bien passer à 250 % ou 3 000 % sans rien changer : il s’agit de simples jeux d’écriture, auxquels ne correspond aucun mouvement de fond effectif. Il n’existe d’ailleurs même pas de caisse par laquelle de tels mouvements seraient susceptibles de transiter.

Des projections faussées

Le COR écrit également que « le taux de prélèvement global, qui représente actuellement environ 31 % des revenus d’activité, diminuerait progressivement pour atteindre près de 29 % » en 2070 (1). Le rapport précise que « cette diminution résulterait principalement d’un effet de structure lié à la baisse progressive du poids de la masse salariale de ces régimes qui ont un taux de cotisation les plus élevés (en particulier le régime des fonctionnaires de l’État), dans la masse totale des rémunérations. » De la sorte, « la maîtrise des dépenses publiques à travers la maîtrise des rémunérations et de l’emploi dans la fonction publique se traduit, du fait de la convention utilisée (2), par des ressources moindres pour le système des retraites et ainsi à une dégradation du solde. »

Autrement dit, par ce que le COR appelle un « résultat paradoxal », toute baisse du nombre de fonctionnaires se traduirait par une diminution parallèle des ressources du système de retraite, puisque les cotisations de l’État diminueraient elles aussi.

En réalité, il n’en va pas ainsi puisque, répétons-le, ces cotisations des fonctionnaires de l’État ne sont jamais versées et n’ont donc pas d’effet sur les ressources du système. Les pensions versées (à hauteur de 54 milliards d’euros en 2018) sont directement imputées sur le budget de l’État et creusent le déficit public.

De ce fait, les projections du COR (selon lesquelles le déficit du système retraites dans son ensemble serait multiplié par quatre d’ici 2022, jusqu’à représenter 0,4 % du PIB, soit quelque 12 milliards d’euros) sont faussées, même à court terme.

Voilà comment le Conseil d’orientation des retraites, pour répondre aux attentes des pouvoirs publics, continue d’abuser les Français.

(1) rappelons, pour donner une idée de la valeur de ce type de "projections" à l’horizon de cinquante ans, que le COR a été contraint de réviser sensiblement celles qu’il avait émises l’an dernier seulement…

(2) Il s’agit de la convention comptable COR, concernant le régime de la fonction publique de l’État et les autres régimes spéciaux.


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