Les cotisations fantômes de l'Etat employeur

Le dernier rapport du Conseil d’Orientation des Retraites tente à nouveau d’accréditer l’idée que l’Etat employeur cotise pour ses fonctionnaires. Mais ses propres contradictions montrent l’inverse.

Le Conseil d’Orientation des Retraites (COR), attaché aux services du Premier ministre, a publié fin novembre un rapport annuel qui contient, comme toujours, des informations intéressantes à côté de fortes contre-vérités. Ainsi, au chapitre consacré aux « structures de financement des régimes de retraite », les rapporteurs écrivent-t-il, d’entrée de jeu, qu’ « en 2019, les dépenses du système de retraite se sont élevées à 330,7 MM d'€ et les recettes à 329,7 MM d'€ ». Or, ce montant des recettes est très sujet à caution.

On lit, en effet, dans la suite du document, que «79 % du financement du système de retraite proviennent de cotisations sociales (262,7 MM d'€) – dont 40,3 MM d'€ de cotisations de l’Etat en tant qu’employeur au régime de la fonction publique de l’Etat (FPE) ». Il est aussi précisé que les cotisations représenteraient 99 % des recettes dans le régime des fonctionnaires de l’Etat, et 96 % dans celui des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers !

Or, ces chiffres concernant les cotisations prétendument versées par l’Etat employeur ne correspondent à aucune réalité. Comme Sauvegarde Retraites l’a montré à maintes reprises, dans la fonction publique les cotisations sont fictives et se réduisent à de simples jeux d’écritures. Il n’existe même pas de caisse de retraite de la fonction publique de l’Etat ! Ce dernier prélève directement sur le budget public, autrement dit sur les impôts payés par l’ensemble des contribuables, de quoi payer les pensions de ses fonctionnaires retraités.

Les assertions du COR sont d’autant moins crédibles qu’elles se contredisent.

Ainsi, les rapporteurs indiquent-ils qu’une partie importante des ressources du système de retraite (12 %, soit 38,2 MM d'€) serait constituée des impôts et taxes affectés (ITAF). La part de ces derniers dans l’ensemble des ressources a même augmenté de 4,3 %. Au régime général (CNAV), par exemple, la part des cotisations représente 64 % des recettes, tandis que la part des ITAF est passée de 2 % à 11 % entre 2004 et 2018 (ce qui est d’ailleurs énorme !) Mais si, en revanche, les cotisations représentent 99 % des ressources de la fonction publique de l’Etat, faut-il conclure que les impôts et taxes n’y comptent pour rien ?

Le COR développe un argumentaire technocratique complexe pour tenter de démontrer qu’en fin de compte, la différence entre l’effort contributif des salariés du privé avoisinerait 16,9 % et celui des fonctionnaires civils de l’Etat 20,3 % : soit un écart de 3,3 points seulement au détriment de ces derniers, qui justifierait (au passage…) les avantages dont ils bénéficient : « dans les régimes où l’effort contributif des actifs est plus élevé, les prestations retraites seraient meilleures ».

Mais, malgré cette tentative poussive d’explication, la vérité pointe entre les lignes. On relève aussi, dans l’exposé du COR, cette précision intéressante : « les régimes de la fonction publique et les régimes spéciaux sont automatiquement équilibrés (par une subvention ou une contribution) ou bénéficient d’impôts et taxes affectés ». Et cette simple observation suffit à ruiner le tour de bonneteau technocratique.


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