L'illusion de la retraite à soixante ans

Comment syndicats et partenaires sociaux ont grugé les retraités dont certains se retrouvent aujourd'hui au pied du mur.

En 1981, avec l’avènement de François Mitterand, l’âge de la retraite, jusque-là fixé à 65 ans dans le régime général de la Sécurité Sociale, tombe à 60 ans. Dans les esprits, il va de soi que cet âge de 60 ans concerne tous les régimes de retraite, les régimes complémentaires y compris. La meilleure preuve n’en n’est-elle pas que ceux qui bénéficient d’une retraite à taux plein dans le régime général bénéficient d’une retraite à taux plein dans les régimes complémentaires ? 60 ans dans le régime général, mais toujours 65 ans à l’ARCCO ou à l’AGIRC Malheureusement, il s’agit simplement d’une illusion, un flou artistique soigneusement entretenu ; en effet, ni l’AGIRC, ni l’ARCCO n’ont voulu s’aligner sur le régime général et ces deux organismes ont maintenu l’âge de départ à 65 ans. La réalité est simple : ce n’est qu’à titre dérogatoire que ceux qui bénéficiaient d’une retraite à taux plein dans le régime général à 60 ans ne se voyaient pas appliquer de minoration sur leur complémentaire. Pendant vingt ans, cette dérogation a fait office de règle mais les accords de février 2001 y ont mis un terme: la promotion 1943 sera la dernière à partir à soixante ans. Un douloureux retour à la réalité : 22 % en moins sur sa complémentaire. A partir du 1er octobre 1943, changement de règle du jeu: on applique les textes à la lettre ; c’en est fini des "aménagements". Le cotisant aura alors deux options : ou prendre sa retraite à soixante ans et percevoir une complémentaire amputée de 22 % ou travailler jusqu’à soixante-cinq ans. Tous les pays voisins allongent la durée de cotisation pour tenter de faire face au déséquilibre démographique; a priori, la suppression de cette dérogation ne serait pas, à première vue, scandaleuse. Pas, tout du moins, si le cotisant conserve la liberté de faire un choix entre travailler plus longtemps et toucher plus ou s’arrêter et avoir une pension moindre ; elle est, en revanche, beaucoup plus contestable pour ceux qui sont partis en pré-retraite : pour eux, une complémentaire amputée de 22 % à coup sûr et aucune possibilité de faire marche arrière. Ils font les frais de la politique des partenaires sociaux et des syndicats qui ont préféré laisser les cotisants dans l’incertitude en négociant des accords portant sur des mesures dérogatoires limitées dans le temps. Nous recevons un très nombreux courrier des pré-retraités qui se trouvent dans cette situation et qui nous disent qu’ils auraient préféré, s’ils avaient su, poursuivre leur activité. Il est vrai qu'il est révoltant, pour eux, de se retrouver aujourd’hui au pied du mur.

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